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Delacroix : "Femmes d'Alger". (1838)

« Femmes d'Alger » d'Eugène Delacroix (1834)

(Huile sur toile, 180 x 229. Paris, Musée du Louvre)

 

 

   « C'est beau, c'est comme au temps d'Homère ! Dans le gynécée, la femme s'occupe des enfants, file la laine ou tisse de splendides tissus. C'est la femme comme je la comprends ... »

   Une image bien traditionnelle que celle que Delacroix trace dans son Journal après une visite dans un harem durant son séjour en Algérie (25-28 juin 1832).

   Fasciné par le décor, la lumière, les couleurs, il prend des notes, trace de rapides esquisses qu'il élaborera ensuite dans son atelier. De ses souvenirs et de ses notes naît et prend forme une grande toile représentant quatre femmes languides ... (pour la première à gauche, Delacroix fait poser une modèle parisien).

   « Ce petit poème d'intérieur plein de repos et de silence, encombré de riches étoffes et de brimborions de toilette, exhale un je ne sais quel parfum de mauvais lieu qui nous guide assez vite vers les limbes insondés de la tristesse ... »

   Les mots sont de Baudelaire ; ils donnent une interprétation de l'œuvre qui dépasse peut-être les intentions de Delacroix, mais reflète bien sa sensibilité. Car le peintre sait donner un sens aux choses, aux formes et aux attitudes, et la richesse de la composition, des couleurs et des détails qui nous offrent une image apparemment si sereine, nous parle aussi de la mélancolie discrète et de la tristesse des prisons dorées. Une atmosphère qui envahit entièrement la toile : elle se dégage de l'expression des visages comme de l'abandon des corps et de l'attente exprimée par le désordre des objets.

   Baudelaire encore, à propos de Delacroix : « L'idée orientale prenait en lui vivement et despotiquement le dessus. Il considérait les femmes comme un objet d'art, délicieux et propre à exciter l'esprit. »

   Revenons à notre tableau : la structure de la composition souligne l'abandon de la première figure à gauche.

   Les deux femmes au centre, semblent se parler à voix basse, placées selon l'habitude de Delacroix en une sorte de « contrapposto », c'est-à-dire de réciprocité des formes qui leur donne plus de volume et de présence.

   La femme de droite qui se tourne pour saluer ses compagnes d'un petit geste de la main, semble avoir traversé toute la scène pour en sortir des limites de la toile. Une invitation à la liberté ou un pied de nez dérisoire à cette douce servitude ordinaire des harems ? Un tableau allégorique renvoyant à la condition féminine ? Peut-on aller jusque-là ?

Version "Picasso" :

 

 

 

 

 



13/07/2008
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