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"Il Giorno della Civetta" (Le Jour de la Chouette) de Leonardo Sciascia (1961)

    L'histoire se déroule au milieu des années 1950 en Sicile , bien qu'il n'y ait pas de références temporelles précises.
   L'élément qui conduit à 1950 est le fait que la mafia a commencé à agir, en Italie et en particulier en Sicile, précisément dans ces années par la corruption et les meurtres.
   Le moment historique est fondamental pour l'histoire: en fait, à l'époque, le gouvernement a nié l'existence de la mafia et, par conséquent, même la population n'a pas cru qu'elle existait réellement.

   

 

   Avec ce roman " Le jour de la chouette ", Sciascia se concentre pour la première fois sur le phénomène de la mafia et ses crimes, un problème à l'époque souvent déformé ou minimisé par les organes d'information et de pouvoir. Le roman est une dénonciation piquante non seulement de la mafia mais aussi d'une classe politique corrompue et mesquine, de la violence submergée et de la corruption politique, dans une tentative de faire tomber le mur du silence qui protège les épisodes de connivence entre l'État et la mafia.

 

  En Sicile, un homme est assassiné en pleine rue au petit matin. Plusieurs dizaines de témoins assistent au meurtre, mais quand les policiers arrivent pour les interroger, tous prétendent n’avoir rien vu. Le crime a vraisemblablement été commis par un mafieux et personne ne veut témoigner contre celui-ci, par crainte de représailles. Le capitaine Bellodi, qui s’occupe de l’enquête, identifie les coupables et découvre que le meurtre a été commandité par un personnage haut placé, qu’il fait arrêter. Mais l’individu dispose de protections ou, plus exactement, il appartient à la mafia et celle-ci a les moyens de faire pression sur les personnes susceptibles de faire du tort à ce personnage (Mariano Arena). Des alibis fictifs, mais dont il est impossible de prouver la facticité, sont donc fournis aux différentes personnes concernées par l’affaire, elles sont relâchées et on nous laisse entendre à la fin du roman que des personnages innocents vont vraisemblablement être arrêtés à leur place, sous prétexte qu’il s’agirait d’un crime passionnel (l’épouse du défunt avait un amant).

 

   Le roman est court et écrit avec une grande concision. Il ne décrit pas très précisément le fonctionnement de la mafia mais montre bien son effet, l’omerta, la crainte qu’elle provoque chez tous, la liberté d’expression qu’elle supprime quoique les intéressés soient censés vivre sous un régime démocratique, l’aveuglement que l’on feint vis-à-vis de la réalité (plusieurs personnages déclarent ignorer ce qu’est la mafia, ce qui est d’une impudence extrême et, d’une certaine manière, assez hilarant pour le lectorat étranger dans la mesure où la Sicile est justement très connue pour le fait qu’elle héberge cette organisation criminelle). L’histoire manque parfois un peu de clarté dans la mesure ou le narrateur s’abstient souvent de nommer les personnages, mais cela n’affecte pas vraiment la qualité générale du récit. L’idée que le crime organisé puisse être si puissant qu’il porte atteinte aux fondements de la république et des Droits de l’homme, pourtant officiellement respectés par le pays concerné, est intéressante, montre la fragilité d’un gouvernement, ce pourquoi il n’y a pas vraiment de solution proposée : Bellodi rêve un moment d’échapper aux contraintes constitutionnelles pour pouvoir lutter contre la mafia, mais ce rêve est pratiquement tabou puisqu’il revient à remettre en cause les principes de la démocratie, ce qui n’est pas le propos du capitaine.

 

   Le titre du livre laisse perplexe, dans la mesure où à aucun moment il n’est question de chouette dans le roman, mais on peut supposer qu’il s’agit d’une image, normalement une chouette n’est jamais censée voir le jour, la notion est entièrement étrangère pour elle, le jour vu par une chouette est pour ainsi dire un scandale du point de vue des lois naturelles, comme est un scandale, la présence t l'activité flagrantes de la mafia, dont on feint d’ignorer l’existence, au même titre que l’oiseau nocturne peut effectivement ignorer la réalité de la clarté diurne. En outre, la chouette est le symbole de la sagesse, or les personnages du livre parlent à plusieurs reprises de la folie (donc l’antithèse de ce que la chouette est censée représenter), celle des situations causées par l’action des institutions, officielles ou occultes. L’ouvrage est à mi-chemin entre le roman policier et le documentaire, en passant par le pamphlet politique. On regrette qu’il ne donne pas davantage de détails sur son sujet : il se présente plutôt comme une fable et tend par conséquent à une certaine généralisation. L’auteur lui-même à la fin du livre précise qu’il ne peut pas écrire plus explicitement, du fait des retombées que pourraient causer pour lui des dénonciations plus claires à l’endroit de l’organisation mafieuse.

 

   

   " Le jour de la chouette " est une histoire policière, de dénonciation sociale. Sciascia s'inspire d'un événement réel , le meurtre d'un syndicaliste communiste, Miraglia, par la mafia, à Sciacca en 1947. Un complot passionnant, mais avec une fin différente de la plupart des romans policiers, comme le capitaine Bellodi , bien qu'il ait enquêté correctement et intelligemment, il n'est pas en mesure de condamner les membres mafieux coupables, qui parviennent à s'en sortir "gagnants".


  À travers ce roman, Leonardo Sciascia veut dénoncer le silence, l'indifférence, la peur et surtout la mentalité et le mode de raisonnement différents et singuliers, caractéristiques de la Sicile.
  L'utilisation du genre du crime elle est déterminante pour déterminer une grande implication du lecteur. Sciascia veut dénoncer la réalité de la mafia sicilienne et sa connivence avec le pouvoir politique, afin que le lecteur en prenne conscience et apprenne à la connaître pour la combattre.

 



21/03/2020
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