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"Introduction à la psychanalyse" de S. Freud.

Introduction à la psychanalyse

Sigmund Freud (1856-1939)

Essai, Autriche, 1917.

 

 

 

Résumé :

 

   Freud introduit son lecteur à la psychanalyse par le biais de l'étude des actes manqués et des rêves auxquels tout homme normal est confronté. Le but de cette analyse préliminaire à celle des symptômes névrotiques est de permettre à tout un chacun de bénéficier d'un matériel d'analyse abondant : les actes manqués, inattentions et maladresses involontaires tels les lapsus. Ainsi, un président de la chambre des députés ouvre la séance par ces mots : «Je déclare la séance close. » Par de nombreux exemples, Freud en arrive ainsi à la conclusion suivante : pour qu'il y ait lapsus, ou oubli, ou tout autre acte manqué, il faut qu'il y ait une raison autre que la fatigue ou l'inattention. Cette raison, c'est un refoulement, une donnée qu'on souhaite cacher mais qui essaye d'émerger malgré tout. Il en résulte un compromis entre la pensée consciente acceptable et la pensée que l'individu n'accepte pas consciemment. Appliqué à l'oubli (j'oublie de poster une lettre, je ne parviens pas à retenir le nom de telle personne), ce même principe permet de décrypter une pensée ou une intention que l'individu ne s'avoue pas à lui-même (je ne souhaite pas contacter cette personne, je n'apprécie pas cette autre).

   Freud passe ensuite à l'étude des rêves et, sur les mêmes bases, pose le fait que les rêves ont un sens et ce sens est la réalisation d'un désir. Ce qu'il démontre par l'analyse des rêves d'enfants, facilement intelligibles parce que non codés. Par exemple, après un voyage en mer, une fillette est déçue de sa brièveté. La nuit-même, elle rêve qu'elle est à nouveau sur le bateau. Mais avec l'âge et les contraintes sociales et morales dont se pare notre conscient, tous nos désirs ne sont plus acceptables, ils sont refoulés dans l'inconscient. Lors des rêves, nous réalisons ces désirs mais de manière déguisée.

   L'inconscient transpose ces souhaits en rêves anodins ou fantastiques acceptables par le conscient du dormeur. Ce déguisement est le compromis grâce auquel l'inconscient passe la censure du conscient. Je rêve que je me lève me permet de ne pas me lever (principe du plaisir) tout en satisfaisant le principe de la réalité.

   Mais, bien souvent, le rêve est beaucoup moins lisible : le contenu latent (le désir caché) est parfois fort éloigné du contenu manifeste (le récit du rêve). Freud remarque qu'il existe une symbolique commune (la clé, la pomme...) essentiellement sexuelle et une symbolique individuelle du rêve. C'est pourquoi il est nécessaire que le rêveur tente lui-même le décryptage de ce dernier. Le langage utilisé par le rêve est qualifié d'archaïque ou de régressif, c'est-à-dire qu'il remonte à des états depuis longtemps dépassés de notre développement intellectuel. Ce langage dévoile ses propres mécanismes : le, rêve condense plusieurs faits en un seul, déplace l'émotion d'un «objet» vers un autre et son décryptage se fait alors comme celui d'un rébus. Chaque élément du rêve est susceptible de renvoyer à un autre et ainsi de suite jusqu'au contenu latent. Le rêve est donc la réalisation d'un désir, désir la plupart du temps refoulé, c'est-à-dire inaccessible au conscient.

   Freud aborde alors la seconde partie de son cours : les névroses qui se caractérisent par un comportement inadapté par rapport aux exigences de la vie quotidienne. Elles entraînent des désagréments dont le malade est conscient mais face auxquels il est incapable de réagir. Ainsi cette femme qui ne peut s'endormir sans avoir au préalable accompli un rituel long et fastidieux. Freud prétend voir dans ces attitudes un compromis (cf. le rêve, les actes manqués) qui permet aux malades de se protéger contre les effets d'un refoulement (l'angoisse, par exemple).

   Freud va donc procéder au décryptage du comportement inadéquat comme pour le rêve, afin d'aboutir à la pensée inconsciente refoulée. Cette interprétation va nous mener aux causes de la névrose, à sa formation et à son sens. Freud dégage de son analyse une constante : les actes névrotiques sont la réalisation d'un désir inconscient. Alors que, selon Freud, la psychiatrie ne se préoccupe pas du mode de manifestation ni du contenu des symptômes de la névrose, le psychanalyste porte toute son attention sur l'un et l'autre et réussit à établir que chaque symptôme a un sens et se rattache étroitement à la vie psychique du malade. A partir de nombreux exemples dont l'ouvrage est émaillé, il met en évidence les caractères généraux de la névrose. Premièrement, les malades laissent l'impression d'être fixés à certains fragments de leur passé. Certains événements ou désirs inconscients laissent une trace indélébile dans la vie du malade. La névrose peut alors se définir comme l'incapacité de réagir normalement à un événement psychique d'un caractère affectif très prononcé. Deuxièmement, lors de l'exécution de l'acte obsessionnel, le malade en ignore le sens et le but ; il faut donc parler de processus psychiques inconscients. Dès que ceux-ci sont amenés à la conscience du malade, et qu'ils sont acceptés, les symptômes de la névrose disparaissent. Mais pour réussir cette prise de conscience, il faut vaincre les symptômes de résistance et de refoulement des névroses, le refoulement étant le processus pathogène qui se manifeste par l'intermédiaire d'une résistance. L'oubli de l'événement qui a entraîné la névrose porte sur des faits que le malade veut se cacher. Tout comme dans le phénomène des rêves ou des actes manqués, les désirs inconscients parce que refusés par la censure du conscient tentent de se réaliser de manière déguisée. Leur satisfaction obtenue par le biais de l'acte obsessionnel provoque des souffrances dont la plus importante est l'angoisse du moi face à un désir (ou à la libido) non réalisé. Pour introduire cette notion de libido, Freud consacre un chapitre à la sexualité humaine et, avant tout, aux trois stades de la sexualité infantile (orale, anale, phallique).

   La conclusion de l'Introduction à la psychanalyse réside dans l'affirmation de l'existence de l'inconscient, ou pour être précis, de la valeur de vérité de l'hypothèse e l'inconscient psychique et de son mode de fonctionnement identique aussi bien dans les rêves et dans les actes manqués que dans les névroses, c'est-à-dire la réalisation d'un désir de manière déguisée acceptable par la censure du conscient. Ce déguisement peut principalement s'exprimer sous forme de déplacement et/ou de condensation.

 

Pistes de lecture :

 

D'Anna O. au concept.

 

   Neurologiste et psychiatre autrichien né en 1856, le père de la psychanalyse débute ses études de médecine en 1873 à Vienne. En 1885, il s'oriente vers la psychiatrie et vient suivre en France l'enseignement de Charcot dont il retient en particulier l'idée selon laquelle l'hystérie et les névroses sont des affections psychiques sans lésion organique.

   Installé à Vienne, il travaille de 1895 à 1897 avec son collègue Breuer sur l'exploration du passé mental par le biais de l'hypnose (le cas Anna O.). Il publie en collaboration avec Breuer les Études sur l'hystérie et pose les bases de sa doctrine psychanalytique : la guérison des névroses par la pure analyse psychique et cela non plus grâce à l'hypnose mais par l'association libre.

   À la même époque, Freud à Vienne et Charcot en France se rendent compte qu'à la base de tout traumatisme existe un événement à coloration sexuelle. Freud réalise alors que le rêve (La Science des rêves, 1900) et les actes manqués (Psychopathologie de la vie quotidienne, 1904) fonctionnent sur le même mode que les névroses et que la coloration sexuelle de ceux-ci provient de la petite enfance (Trois Essais sur la théorie de la sexualité, 1905). Tout l'intérêt de ces découvertes réside dans le fait que Freud va ainsi développer une étude du comportement psychique humain en général. Tout homme passe, durant sa petite enfance, par trois phases de sexualité (c'est-à-dire génératrices de plaisir) : la phase orale (nourriture), la phase anale (plaisir de l'élimination), la phase phallique (organe sexuel masculin ou son absence). A chaque phase, si elle n'est pas dépassée, il peut y avoir risque de «perversion » ou de traumatisme futur.

 

Le complexe d'Oedipe.

 

   En 1915, Freud opère une première systématisation de sa pensée (La Métapsychologie) et définit la pulsion comme étant le représentant psychique des excitations internes, elle obéit au principe plaisir/déplaisir : ce qui supprime l'excitation comme besoin, c'est la satisfaction. II distingue la pulsion du moi (autoconservation) et la pulsion sexuelle (libido) et leur mode de fonctionnement (renversement, retournement, refoulement...). Par la suite, Freud ramènera les conflits de l'inconscient à trois composants psychiques de la personnalité : le Çà (das Es), le Moi (das Ich) et le Surmoi (das Ueberich) (Au-delà du principe de plaisir, 1920).

   En 1923, Freud publie la première systématisation de sa pensée (Le Moi et le Çà). Partant de ses observations antérieures, il constate que le moi se compose d'éléments détachés qui ne s'inscrivent pas dans l'inconscient : le Çà, le Moi et le Surmoi. A la base de cette répartition : le complexe d'Oedipe et l'autorité parentale (l'amour que porte le garçon pour sa mère et la jalousie qu'il porte à son père et inversement pour une fille). Le Çà, source première du psychisme, produit les manifestations instinctives, son seul guide est le principe du plaisir. Le Moi cherche à soumettre le Çà au principe de réalité; en d'autres termes, à remplacer les buts sexuels par d'autres buts (l'art, entre autres). Le complexe d'Oedipe se résout par une identification au père et donc par une introjection de l'instance d'autorité. C'est l'emprise du Moi, sur le Çà et, par extension, le Surmoi qui préside à la naissance de la conscience morale, c'est-à-dire une autorité supérieure à l'individu. Ce Surmoi contient en germe les religions, par exemple.

 

Synthétiser.

 

   Parti de l'analyse de la névrose, Freud est arrivé à décrire et à systématiser le fonctionnement du psychisme humain, élargissant le champ de ses études dès 1913 aux civilisations humaines (Totem et Tabous) et à leurs manifestations culturelles (Délires et Rêves dans la « Gradiva » de Jensen) et religieuses.

   Les cours que donna Freud à l'université de Vienne en 1914 reprennent la synthèse de ses recherches et ouvrages et furent regroupés par Freud lui-même dans son Introduction la psychanalyse (1917 et 1932).

   Si Freud s'est octroyé d'éclairer toutes les activités humaines à partir de la psychanalyse et qu'en ce sens, il propose une lecture du comportement humain comme étant un jeu de pulsions,  vision peut-être trop limitée, sa théorie a profondément marqué la pensée du XX° siècle.

 

 

 

 

 

 

 

 



28/09/2008
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