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Jésus (Entre 6 et 4 av. notre ère-30 après)

Jésus

 (Entre l'an 6 et l'an 4 av. notre ère – 30 apr. notre ère)*

*  C'est seulement au VI° siècle que l'on tenta de définir une origine pour les calendriers du monde chrétien. Une faute de datation plaça l'an 0, celui de la naissance du Christ, quatre ou cinq ans plus tard que l'année réelle de cette naissance. On peut, par croisement des textes de Matthieu et Luc, situer cet évènement en l'an 5 avant notre ère. Pour ce qui est du jour, on hésita longtemps dans l'Eglise, entre le 6 janvier, le 19 avril et le 17 novembre. On choisit finalement le 25 décembre symboliquement : c'était la fête du dieu solaire : Mithra dans tout l'Orient antique.

   Jésus de Nazareth voulait restaurer le messianisme juif. Il jeta, en fait les fondements d'une religion universelle.

     

   Lorsque Yeshua (transcrit en latin par « Jesus »), fils de Joseph le charpentier et de Miriam (Marie), naît entre l'an 6 et l'an 4 d'avant l'ère chrétienne, c'en est fait depuis longtemps de l'indépendance des Hébreux. Malgré des révoltes successives, toutes écrasées violemment par l'occupant romain, le peuple juif n'a plus d'Etat unifié. La Palestine est divisée en royaumes rivaux placés sous tutelle romaine. La Galilée n'a même plus de roi ; elle est gouvernée par un conseil, le Sanhédrin, mais la réalité du pouvoir appartient aux procurateurs romains. Dans cette atmosphère d'humiliation nationale prolongée, le peuple juif, divisé lui-même en factions opposées, attend la venue d'un libérateur, le Messie annoncé par les prophètes des Ecritures.

   Jésus, fils du charpentier Joseph naît donc dans un contexte où le débat essentiel, celui de l'indépendance de la nation hébreue, ne peut se fonder que sur une relecture de la tradition messianique : en effet, pour la pensée juive, il est clair que l'histoire d'Israël ne peut être comprise que sous l'éclairage de l'interprétation de la Bible.

   C'est pourquoi le message de Jésus, qui est religieux aussi bien dans ses fondements que dans ses apparences, est aussi un message politique.

Jésus ou « le Christ » ?

   Autour de cette équivocité se joue le statut de Jésus de Nazareth, soit le personnage historique et de Jésus-Christ, soit le Messie, fils de Dieu, ressuscité d'entre les morts. Il n'est pas certain que pour l'homme Jésus cette ambiguïté ait été toujours clairement levée. La richesse de son message tient aussi bien à ses doutes qu'à ses certitudes.

   Une chose est sûre, néanmoins : deux ou trois années de prédication ont bouleversé l'histoire de l'Occident, puis de toute la planète. La « bonne nouvelle », annoncée par le Christ et reprise par ses disciples, a entraîné des milliards d'hommes dans un tourbillon de ferveur dont l'ampleur est stupéfiante si on la rapporte à la modestie du personnage qui est à  son origine.

Jésus et les sectes juives.

   Les textes chrétiens dessinent le portrait d'un Juif fervent, plutôt en conflit avec les sages, les rabbins et les interprètes officiels des Ecritures. Hostile aux pharisiens, sourcilleux docteurs de la Loi, gardiens auto-proclamés de la foi juive, dont la casuistique, l'exercice minutieux et quasi maniaque du Droit religieux, le révolte, il stigmatise la lecture rigoureuse des textes saints et l'observance formelle des rites quand une vraie foi ne les accompagne pas. Jésus semble plus proche d'une autre école de pensée, celle des esséniens, à laquelle se rattachait Jean le Baptiste, son cousin, dont il suivit un temps la prédication.

   Ascétique, tourné vers la spéculation, la pure extase spirituelle, ainsi que l'attente inquiète du retour du royaume de Dieu, Jean le Baptiste a très certainement contribué à élaborer le message de Jésus, dont l'essentiel tourne autour du thème de l'annonce d'un Jugement imminent, d'une victoire de Dieu sur le mal, de l'établissement d'un royaume divin sur terre et dans les cieux.

   Jésus, tel qu'il apparaît dans les textes chrétiens, semble bien loin des zélotes, secte violemment nationaliste prônant l'action armée contre les occupants romains et les collaborateurs juifs. Il est difficile de savoir  s'il s'agit d'une censure postérieure à sa mort, mais le fait est là : le nationalisme du Jésus des Evangiles manque de vigueur et il est vrai que s'il affirme souvent des tendances populistes dans ses paraboles, il ne diffuse aucun message social révolutionnaire : même s'il n'aime guère les riches sadducéens, conservateurs et volontiers conciliants avec les Romains, le Christ ne condamne ni la propriété, ni le salariat, ni la présence romaine.

La rupture avec le judaïsme.

   Bien plus que sur la question du Sabbat et des autres rites, c'est sur un point de doctrine, l'arrivée du Messie sur terre, que Jésus rompt avec le judaïsme officiel. Les guérisons et les signes prodigieux qui accompagnaient sa prédication ont pu faire voir dans le fils du charpentier, le Messie attendu. Inversement, la ferveur populaire, mêlant agitation politique et mysticisme, a pu pousser graduellement Jésus vers l'acceptation de son statut de fils de Dieu incarné. Tel qu'il apparaît dans les Evangiles, Jésus, en effet, revêt incontestablement son rôle de Messie. Devant ses juges, il ne semble plus en douter. Cela signe sa condamnation à mort : pour les prêtres juifs, c'est un blasphème. En outre, l'influence croissante qu'il exerce menace l'ordre public. Il sera donc crucifié.

Le choc de la résurrection.

   Il serait inexact de dire que l'Antiquité ne connaissait pas la croyance en la résurrection avant le christianisme. Le mythe égyptien d'Osiris ou de nombreux mythes grecs en témoignent.

   Le caractère décisif et inédit de la résurrection du Christ tient à la dimension massive et indestructible de cette croyance, dès l'origine. Pourtant les apôtres eux-mêmes ont hésité à y croire.

   Mais il est clair que la foi en la résurrection du Christ est le point de dogme le plus fondamental dans le christianisme. Les sectes christiques qui refusaient d'y croire étaient très minoritaires dans l'Eglise primitive ; elles furent excommuniées et disparurent rapidement.

   La foule des croyants a admis cette nouvelle extraordinaire : un homme mort est à nouveau vivant, simplement parce qu'il ne s'agit pas seulement d'un homme parmi les hommes, mais du fils de Dieu, incarné.

L'éclectisme de Jésus.

   Peut-être est-il permis de penser que, parmi les raisons qui engendrent cette unanimité dans la croyance en le Christ ressuscité, figure l'éclectisme de Jésus. En effet, chacun, dans le peuple peut trouver sa place dans l'un de ses comportements, dans ses propos : un peu zélote quand il chasse les marchands du Temple, Jésus plaît aux jeunes exaltés. Un peu essénien quand il se retire dans le désert, il séduit les ascètes rigoureux. Il calme l'inquiétude des saduccéens en rendant à César ce qui lui appartient, défend les publicains, fustige les pharisiens tout en dînant parfois à leur table.

   En visant tout le monde, le message moral de Jésus joue avec l'anticonformisme (le respect circonstancié du Sabbat, la défense des prostituées) et le conservatisme tout à la fois. Ce message est fondé sur une extraordinaire foi en Dieu et en sa créature : l'homme. Son universalité tient à cette mystérieuse communauté de la nature humaine, que Jésus exprima de manière à la fois modeste et transcendante.



04/11/2008
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