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Leçon 30 : Qu'est-ce que l'Inconscient psychique ? (Cliquez sur ce lien !)

  L’objet central de la psychanalyse se trouve être l’Inconscient. Or l’Inconscient n’a guère la consistance expérimentale qu’exige toute science sérieuse. En outre, échappant par définition à l’emprise de la conscience, on voit difficilement comment l’Inconscient se laisserait appréhender sans résistance, s’offrant tel quel à la rationalité scientifique. Comment alors prétendre fonder une théorie sérieuse sur un objet proprement impalpable, contestable dans son existence même ?

 

   Ce qui est moins contestable, en revanche, c’est la production par les sujets que nous sommes de phénomènes échappant à la vigilance de la conscience : nous rêvons, notre belle assurance verbale trébuche sur des lapsus, nous sommes agités de T.I.C., parfois de T.O.C … Certes, à quoi bon s’attarder sur ces phénomènes secondaires qui nous déshonorent ? Tel est le verdict des ennemis de la psychanalyse. Mais on peut aussi adopter une attitude inverse : il est si palpitant de donner du sens à nos comportements, de savourer la puissance imaginative de nos rêves.

 

   Si nous sommes dans cette optique, alors on aura besoin d’une hypothèse explicative : les phénomènes échappant à la conscience sont nécessairement produits par une cause échappant à la conscience. Pourquoi ne pas nommer cette cause, l’Inconscient psychique ?

 

   Freud lui-même renonce à l’impossible pari de décrire la nature objective de l’Inconscient et se contente de le tenir pour hypothèse. Or, qui dit hypothèse, dit aussi liberté théorique. On peut nourrir l’hypothèse du sens que l’on veut bien y mettre, jusqu’à ce que tombe le couperet de la confirmation ou du démenti expérimental. Ainsi, l’hypothèse freudienne prend la forme de « topiques », de transposition de l’activité psychique dans des « lieux » eux-mêmes dits psychiques, transposition pratique pour la compréhension et dont on peut dire qu’elle a fait ses preuves. Pour autant, on se gardera d’affirmer que l’Inconscient est autre chose qu’une hypothèse.

 

   Quel est alors le contenu de l’hypothèse freudienne ? Que renferme ce concept d’Inconscient psychique (ou dynamique, selon les ouvrages de référence) que va élaborer Freud ? La réponse pourrait faire l’objet d’un opuscule entier, mais nous allons aller droit au but, d’une manière rapide : l’Inconscient comporte une double dimension : il est à la fois psychologique et tout en même temps, presque physiologique. [N’oublions pas que la grande révolution freudienne, c’est d’avoir réconcilié l’esprit et le corps, pour le meilleur et pour le pire ! Déjà, à travers les symptômes hystériques, on pouvait observer que les patientes (en l’occurrence Anna O.) somatisaient, c’est-à-dire qu’elles exprimaient « corporellement » des troubles psychologiques.]

 

-          Première dimension « psychologique » : l’Inconscient est hypermnésique, c’est-à-dire qu’il se confond avec la totalité des souvenirs, des représentations correspondant à nos vécus, depuis les derniers mois de la vie intra-utérine (avant notre naissance) jusqu’à aujourd’hui (à l’âge que l’on a !) Si notre mémoire « ordinaire » (procédurale : les gestes ; mémoire de travail, mémoire sémantique (le langage), mémoire épisodique (mémorisation de connaissances, par ex. pour un devoir …, c’est-à-dire notre mémoire (ou nos mémoires) de surface que Freud nommera le Préconscient, car elle affleure à la conscience) peut faire l’objet de troubles, de failles, voire être victime d’amnésie comme on peut l’observer dans les cas des malades atteints d’Alzheimer, en revanche l’Inconscient ne souffre d’aucun trouble. L’amnésie n’atteint jamais l’Inconscient. On peut être psychotique, autiste, schizophrène … pour autant, comme le montrent les études cliniques, les informations « mnésiques » (relevant de la mémoire) inconscientes sont là, celles qui ont trait, par ex. aux traumatismes dans l’enfance. Anna O., profondément hystérique, frappée d’amnésie par ailleurs (elle avait oublié sa langue maternelle, trouble de la mémoire sémantique), va réussir à révéler sous hypnose un souvenir « anodin » (du moins en apparence), enfoui en elle depuis presque dix ans : le fait qu’elle n’ait pas réussi à donner l’heure à son père, alors qu’il le lui demandait, quelques temps avant de mourir. Bref, nous portons tous en nous un trésor d’informations liées à notre histoire personnelle et, sauf, atteinte grave du cortex cérébral (accident de la route, lésion physiologique irréversible …), ce trésor reste inviolé. Freud développe ici une théorie proche de la génétique : de même que chaque chromosome porte en lui la mémoire de nos caractéristiques singulières, l’Inconscient porterait en lui la totalité de notre histoire personnelle.  

 

-          Deuxième dimension « quasi-physiologique » : l’Inconscient est le siège des pulsions (expression psychologiques d’exigences corporelles : ex. : la sexualité s’enracine avant tout dans le besoin biologique de procréer, même si elle va ensuite prendre des formes « culturelles » plus élaborées et se détacher de ce besoin initial) À noter qu’une « pulsion » … pousse, impulse, elle est une force vive qui anime le sujet, l’incite sinon à procréer, au moins à produire, à créer ou à détruire : Éros ou Thanatos, pulsion d’amour ou pulsion de mort. Bref, Freud identifie deux pulsions fondamentales : d’abord la « libido », Éros, pulsion érotique, sexuelle (dès 1900) et un peu plus tard, après l’amère constat des horreurs engendrées par la Première guerre Mondiale (les tranchées), la pulsion de destruction, de mort, Thanatos. Ces deux pulsions quoique diamétralement opposées en apparence, se côtoient néanmoins dans le vase clos de l’Inconscient : l’amour se fait parfois destructeur, et la destruction peut parfois être le point de départ d’un ordre nouveau, d’une renaissance.

 

   Notre Inconscient est donc le théâtre permanent (jour et …nuit, comme en témoignent nos rêves !) de cette proximité entre notre histoire personnelle (au complet) et l’énergie débridée produite par nos pulsions. Mais comme on le verra bientôt, ce trésor détenant les secrets de notre histoire personnelle les plus intimes n’est pas disponible, sauf à suivre une cure psychanalytique, de même que nos pulsions débridées ne peuvent s’exprimer telles quelles et sont contenues, retenues, brimées par un puissant mécanisme psychologique et sociologique (la Censure ou le Surmoi), puisque les règles sociales jouent un rôle majeur dans la formation de notre personnalité.

 



16/06/2021
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