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Leçon 4 : Le réalisme : un non-sens artistique. Problématisation (Cliquez sur le lien !)

Bonjour à toutes et à tous, 

 

   "Etre en vacances, c'est n'avoir rien à faire et avoir toute la journée pour le faire !" dit une boutade bien connue … voici une bien douce musique qui s'achève ce lundi matin, avec notre rentrée en distanciel.

   J'espère que les vacances auront été apaisées et ressourçantes pour toutes et tous !

   Voici la suite du programme ... 

 

III-2-3/ « Le réalisme : un non-sens artistique ? »

 

III-2-3-1/ Problématisation.

 

[III-2-3-2/ L’œuvre : un espace à géométrie variable : Léonard de Vinci : un « espace sacré » ; Picasso : un « espace spéculaire » ; Dali : un « espace onirique ».]

 

   Lisons d’abord ces deux citations. Que peut-on en retenir ? Quel point commun y-a-t-il  entre ces deux propos ?

 

1/ « Ce que je voudrais, dit Picasso, c’est faire une corrida comme elle est. Une « vraie » corrida. Évidemment, il faudrait faire le taureau grandeur nature … Mais alors, les arènes autour ? Il faudrait une toile grande comme les arènes … C’est épouvantable de ne pas pouvoir la faire, ce serait magnifique ! »

    « Les Noces de Cana, c’est grand ! », dit quelqu’un. Picasso dit que « « Les noces de Cana » , à côté de l’arène, c’est tout petit. »

   Il rêve. Il suggère finalement … « il faudrait faire cette toile, si encombrante dans les arènes : elle serait toute ronde, naturellement, en forme d’arène … Et pourquoi pas avec un vrai taureau ? »

H.Parmelin, Le peintre et son modèle, Paris, 1965. 

 

2/ Les éléphants, comme le remarquait Swift (l’auteur des Voyages de Gulliver) sont généralement dessinés plus petits que nature, mais une puce est toujours représentée plus grande. Pour créer un éléphant qui aurait non seulement les dimensions, mais aussi les organes, les réactions et l’espérance de vie d’un éléphant, mieux vaut s’adresser jusqu’à nouvel ordre, à un couple d’éléphants plutôt qu’au meilleur des peintres hyperréalistes.

 

   Regardons maintenant ces œuvres :

 

2 L'homme qui marche.jpg

 

« L’homme qui marche » de Rodin [1907]

 

5 Dies Irae de Kurt Wenner.jpg

  

« Dies irae » de Kurt Wenner [2007]

 

7 Edgar Müller.jpg

 

« Sidewalk » d’Edgar Mueller

 

Vidéo (Cliquez sur le lien !) : le « Street Art » d ’Edgar Mueller

 

                                                                    Street Art Edgar Müller                         

 

   Réflexion philosophique : le « réalisme », au sens large du terme (et non pas au seul sens littéraire !), i.e. la tendance de l’art à prendre pour modèle le réel, à en rendre compte avec un degré de fidélité et d’exactitude qui atteint son sommet dans l’hyperréalisme [Jean Olivier Hucleux [1926-2012], son fondateur, jusqu’à Edgar Mueller, par exemple, ce peintre allemand excellant dans l’art de rue illusionniste] est, non seulement frappé : -

-          D’une impossibilité technique (cf. hyperréalisme et Illusion Art), mais encore, relève

-          D’un non-sens esthétique (cf. citations autour de Picasso et de Swift)

 

Impossibilité technique, d’abord, car ce n’est pas l’observation du réel lui-même qui permet de déposer son reflet sur une toile ou dans le marbre, le bronze du sculpteur, mais bien l’emploi de techniques artificielles, de procédés « illusionnistes » permettant de créer un « effet de réel », un trompe-l’œil, dont le rapport avec le réel n’est autre que celui de la pure illusion. Ainsi, essayer de franchir une porte en trompe-l’œil risque bien d’être fatal pour notre nez, de même qu’essayer de marcher les deux pieds au sol, comme « L’homme qui marche » d’Auguste Rodin (1840-1917) nous condamne à manquer de grâce et d’agilité.

 

Non-sens esthétique, également, et surtout peut-être, car u art qui reproduirait à la perfection le réel, serait-il encore de l’art ? Ne se confondrait-il pas avec le réel lui-même. A-t-on besoin de peindre une arène grandeur-nature, comme le dit Picasso, quand il y a tant d’arènes réelles qui remplissent très bien leur fonction ? A quoi bon, quand on se prétend artiste, rajouter du réel au réel lui-même, déjà si envahissant ?

 

   On peut penser, au contraire, que c’est plutôt en s’éloignant du réel que l’art a tout à gagner, en travaillant à son émancipation, en œuvrant pied à pied pour conquérir son autonomie sur le réel. Et comment ? En bâtissant des univers inédits, faisant pâlir de jalousie, le réel lui-même. Les artistes contemporains n’ont que trop entendu la leçon de Picasso en rompant délibérément avec les repères de notre perception habituelle, avec notre horizon d’attente du réel ordinaire. Mais est-ce bien une révolution ? Faut-il voir dans l’artiste classique, un simple reproducteur d’une réalité déjà-là, et dans l’artiste contemporain, le génial inventeur, créateur, d’une réalité inédite ? Sans doute est-ce là un raccourci un peu facile. Il n’est pas certain qu’un Léonard de Vinci soit moins créateur qu’un Picasso ou un Salvador Dali.

 

   Nous essayerons de rentrer dans ces trois univers d’ici peu, afin de regarder cette question de plus près.

 

   Définissons d’abord ce que l’on nomme un « univers artistique », pictural, en l’occurrence, mais qui vaut, d’une certaine manière, également, pour les arts sonores, tactiles, cinétiques, chorégraphiques …

   Avec l’œuvre d’art, nous sommes d’emblée ailleurs que dans la réalité « naturelle », le monde sensible, les choses brutes. Nous sommes dans un autre domaine, qui constitue un espace parallèle, un « monde parallèle », pour parler comme en astrophysique où des termes énigmatiques : art, esthétique, génie, beauté …nous renvoient les uns aux autres et où nous serions condamnés à tourner en rond, si l’horizon ne reculait sans cesse, nous révélant que nous sommes dans un espace sphérique ou « riemannien », à la fois fini et illimité [Georg Friedrich Bernhard Riemann, né le 17 septembre 1826 à Breselenz, Royaume de Hanovre, mort le 20 juillet 1866 à Selasca, hameau de la commune de Verbania, Italie, est un mathématicien allemand.] Bref, l’espace artistique, plutôt qu’un espace euclidien : tridimensionnel, homogène, isotrope (semblable dans toutes ses directions) est bien plutôt un « hyperespace » fini et illimité construit en fonction des normes d’une Léonard, d’un Picasso, d’un Dali, pour n’évoquer que les trois « univers » esthétiques que nous allons maintenant regarder.



26/04/2021
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