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Mahomet (571?-632 apr.J.C.)

Mahomet

(571 ? – 632 apr. J.C.)

 

   Mahomet (Muhammad) était un orphelin issu d'une famille de commerçants, recueilli par son oncle. Il vivait dans la ville de Mekka (La Mecque), dont l'activité principale tournait autour d'une certaine forme de tourisme religieux : les notables et les commerçants locaux profitaient, en effet, de l'afflux de pèlerins venus adorer un monument païen, la Kaaba.

 

La « Pierre noire ».

   Il s'agissait d'une construction à peu près carrée, de 13 mètres sur 12, haute de 17 mètres environ. Dans l'angle sud-est de ce cube de briques (soulignons que « kaaba » signifie « cube » en arabe), à 1,50 m du sol, était encastré un bloc d'origine météoritique de couleur rouge sombre presque noire, objet de rites superstitieux en raison de sa provenance « divine ». Aux autres angles de l'édifice trônaient l'idole d'Al Illal, dieu totémique de la tribu dominante locale (que Mahomet appellera ensuite Allah), et celles de ses deux filles.

   Le culte rendu à Illal (la « divinité » en arabe ancien), à ses deux filles et à la pierre rouge était l'occasion de rassemblements de pèlerins, particulièrement lucratifs.

   Or Mahomet, au cours de ses discussions à La Mecque, et du fait des rencontres faites à l'occasion de ses voyages commerciaux, avait eu de nombreux contacts avec diverses communautés juives et chrétiennes. Il admirait la rigueur du monothéisme judaïque et la rectitude morale des chrétiens, nombreux en Arabie.

   Peu à peu, il acquit la conviction que la foi en un seul Dieu pouvait seule redonner de la vigueur à son peuple, qu'il considérait certainement comme un peu retardé et idolâtre. La corruption généralisée des notables, l'anarchie politique du système tribal, la décadence des rites païens rudimentaires appelaient donc, selon lui une religion nouvelle, d'où découlerait pour le peuple arabe une gloire encore jamais atteinte.

   Mahomet eut alors, à quarante ans, la révélation de sa mission. Sûr de son bon droit, inspiré par l'ange Gabriel (Djibril)*, il amorça une critique violente des rites dont la Kaaba était le centre.

*Sous l'influence du judaïsme, Mahomet avait adopté la pratique du jeûne. Il avait donc pris l'habitude de se retirer durant un mois chaque année dans une grotte de Hira, près de La Mecque. C'est là que, en 610, il eut au cours de ses nuits de méditation, une vision : l'ange Gabriel apparut et lui ordonna de témoigner devant tous qu'il n'y a qu'un seul Dieu. Mahomet s'enfuit et rentra chez lui où il se cacha sous une couverture. L'apparition se répéta et Mahomet, encouragé par ses proches, fut convaincu de l'authenticité de ses visions. Il commença alors à prêcher en public.

La reconquête de La Mecque.

   D'abord perçu comme  un simple illuminé en raison des convulsions qui accompagnaient ses visions, Mahomet fut traité par le mépris. Mais peu à peu, son éloquence enflammée et sa réputation d'intégrité gagnèrent à sa cause de nombreux disciples.

   Les notables de la ville déclenchèrent alors une violente persécution qui contraignit les partisans de Mahomet à un exil forcé. Le 16 juillet 622, soixante-dix familles de « Musilim » (« ceux qui ont fait la paix avec Allah », en arabe) partirent pour Médine. Ce jour fut ultérieurement défini comme le premier de l'an 0 du calendrier musulman. Cette fuite (Hégire provient de l'arabe « hidjra » : émigration) fut un grand traumatisme pour les croyants de la nouvelle foi, qui durent quitter leur maison, leurs amis, leur métier, et souvent même une partie de leur famille non convertie.

   A Médine, Mahomet, regroupant ses forces, vécut huit ans comme un chef de guerre. Il assura la survie de la communauté islamique en lançant soixante-cinq raids et campagnes militaires contre les caravanes de ses ennemis de La Mecque. La bataille de l'oued Badr, en 623 fut un grave échec pour ses adversaires : toute la caravane se rendit aux guerriers de l'islam et les gardes armés furent tués ou capturés.

   Parallèlement à cette guerre sainte menée contre les partisans de l'idolâtrie, Mahomet poursuivait une longue tâche d'élaboration de sa doctrine. Son bon sens et sa générosité faisaient merveille et les habitants de Médine se ralliaient en masse à ses préceptes, avec l'appui des juifs et des chrétiens locaux qui voyaient en l'islam un renfort monothéiste inespéré dans un pays tenu globalement par la superstition païenne.

   Le message moral et religieux de Mahomet se doublait d'un idéal égalitaire qui rassemblait sous la bannière de la nouvelle foi, la majorité des Bédouins pauvres et des artisans des villes, ainsi que les esclaves. La querelle de la Kaaba, à La Mecque, avait clairement établi le clivage social entre notables idolâtres et musulmans pauvres. Entre 622 et 630, plus de deux cents familles rejoignirent le camp de Mahomet et quittèrent la ville.

   Après six ans d'escarmouches ou de batailles rangées, Mahomet se présenta sous les murs de La Mecque en 628, officiellement pour effectuer un pèlerinage à la Kaaba ! Une trêve fut signée, mais les musulmans la rompirent en 630 et prirent la ville presque sans combattre. Afin de ménager les vaincus, Mahomet maintint le culte de la Kaaba, qu'il disait construite par Abraham, mais fit détruire toutes les idoles. L'Arabie entière passa à la nouvelle foi.

Le Coran unificateur.

   Le succès de l'islam a été rapide et durable. La doctrine musulmane a élevé le niveau spirituel de tout un peuple idolâtre, politiquement déchiré par d'incessantes et coûteuses guerres tribales. Mahomet a fait quelques centaines de milliers de Bédouins les maîtres d'un immense univers.

   Aujourd'hui, plus d'un demi-milliard d'hommes observent les obligations de l'islam et adhèrent à sa principale profession de foi : « Dieu est unique et Mahomet est l'envoyé de Dieu. » Le bilan historique de l'action missionnaire de Mahomet est donc considérable. Il tient aussi bien à la personnalité exceptionnelle du Prophète qu'à la qualité de la construction doctrinale dont il est apparemment le seul auteur.

   Malgré sa confusion, parfois, le Coran* demeure cohérent dans ses grandes lignes : traité de morale individuelle et sociale, manuel de théologie, poétique par endroits, familier ou fleuri, le livre se lit aussi bien in extenso que par cours extraits. Le caractère populaire de cet ouvrage (tous les musulmans lisent le Coran* ou l'apprennent par cœur, certains même, ne lisent rien d'autre !) tient au fait que Mahomet était probablement illettré. C'est son secrétaire, Zaïd, ancien esclave ( offert par Khadija à son époux Muhammad) affranchi, qui notait ses paroles.

   Composé au jour le jour, le Coran*, même dans es passage les plus théoriques, demeure donc accessible. Plein de bon sens et d'humour, sévère et péremptoire, parfois, le style du Coran* est celui d'un mystique plutôt débonnaire qui s'enflamme parfois, parlant dur et fort, ou se laissant aller à des conseils très concrets sur des détails de la vie quotidienne parfois bien éloignés de la théologie.

   Intelligent, tenace, sincèrement outré par la corruption des notables et la stupidité des rites idolâtres, Mahomet donna l'exemple d'une vie austère : sa petite maison de brique crue à Médine n'était fermée que par une peau de chèvre. Se nourrissant de figues et de pain d'orge, le prophète de l'islam confessait un fort penchant pour les choses de l'amour. Il était plutôt soigné de sa personne.

   Tout en trayant sa chamelle en public, il dictait ses sentences à Zaïd, acceptant toutes les invitations à dîner, y compris des juifs et des esclaves. En revanche, il fut passablement dur avec les femmes que pourtant il adorait, si l'on veut bien l'entendre, et surtout avec ses ennemis, qu'il trouvait normal de haïr en tant que chef de guerre.

   Soucieux de sa mission unificatrice, à la fois mystique et réaliste, Mahomet exalta les valeurs de la virilité pour se gagner les guerriers et glorifia les pauvres dont il se fit des partisans. L'islam demeure certainement encore aujourd'hui l'une des dernières grandes idéologies combattantes.

 

*De son vivant, Mahomet ne publia rien. C'est seulement à partir de 656 que les fidèles purent avoir accès à une édition complète des sentences du Prophète. A l'aide des notes de Zaïd portées sur du parchemin, des rouleaux de feuilles de palmier, des bouts de cuir… et après avoir fait réciter ce qu'ils savaient aux derniers survivants qui avaient connu Mahomet, les docteurs de la foi publièrent une édition définitive en classant les 114 sourates (chapitres) par ordre de volume décroissant. L'ordre n'est donc ni logique, ni chronologique, mais le Livre foisonne de remarques permettant de définir une éthique collective fondée sur la coopération, la contrainte, la coutume et la foi. Il est considéré comme l'un des textes les plus réussis et les plus purs de l'Arabie ancienne.

  

 



04/11/2008
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